Le quartier de la Nouvelle-Athènes

Le Paris romantique de George SAND
Le jeudi 8 juillet 2004.
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Le square d’Orléans.

Cet article est de circonstance [1]. Il espère vous donner envie de visiter ce quartier né dans les années 1820, rapidement peuplé par les artistes et les écrivains de l’époque et situé dans la capitale, entre les rues Saint-Lazare, Blanche, de La Rochefoucauld et de La Tour-des-Dames.

Commençons par cette dernière, justement.
Au n°1 se trouve le bel hôtel de mademoiselle Mars, construit en 1746 et remodelé en 1822. Melle Mars, comédienne au Théâtre-Français (actuelle Comédie Française, qui accueille en 1830 la bataille d’Hernani), l’achète en 1824. Elle le rénove encore et l’habite jusqu’en 1838. L’explorateur Bougainville y avait demeuré avant elle.
Melle Mars joue en particulier dans Henri III et sa cour d’Alexandre Dumas (qu’elle fait accepter au Théâtre-Français) et dans Hernani en 1830.

C’est mademoiselle Duchesnois, une autre comédienne du Théâtre-Français, qui fait construire l’hôtel voisin en 1822. Elle y vit jusqu’en 1834. Son salon voit passer du beau monde, dont Victor Hugo. Elle est tragédienne et se voit supplantée par Melle Georges dans les années 1830.

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La maison de Talma.

L’architecte qui remodèle l’hôtel de Melle Mars en 1822 et construit celui de Melle Duchesnois la même année est Constantin. C’est lui qui donne son allure néo-classique au quartier dans les années 1820. La guerre pour l’indépendance grecque éclate en 1821. Le nom de "Nouvelle-Athènes", attribué au quartier par Le Journal des débats en 1823, évoque à la fois cette période, le style architectural choisi, et le fait que les comédiens, peintres, musiciens et écrivains le peuplent rapidement.

Toujours dans la belle rue de la Tour-des-Dames, Horace Vernet emménage au n°5 et le tragédien Talma au n°9 [2] (Delacroix décore sa salle à manger).

Une autre population arrive aussi peu à peu, les "lorettes", dénommées ainsi par Nestor Roqueplan [3] car ces femmes qui vendent leurs charmes logent pour la plupart derrière l’église Notre-Dame-de-Lorette.

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L’hôtel de mademoiselle Duchesnois.

Venant de leur appartement du 16 (aujourd’hui n°20) rue Pigalle, George Sand et Frédéric Chopin s’installent square d’Orléans en 1842. On accède à cet endroit de paradis le samedi matin seulement, par le 80 rue Taitbout.
A l’époque, le square s’ouvre vers le 36 rue Saint-Lazare. Il est conçu en 1830. Les deux amants y vivent de 1841 jusqu’à leur séparation en 1847 (Chopin jusqu’en 1849).

George habite au 5 et Frédéric à l’opposé, au 9. Entre les deux vivent leurs amis les Marliani, qui accueillent tout le monde autour d’une table commune. Les Viardot demeurent sans doute à la même époque dans le square.

On le sait peu, George Sand a écrit jusqu’en 1855 des pièces de théâtre, au toal plus d’une vingtaine, qui ne rencontrèrent pas le même succès que ses romans. Indiana (adapté de son roman) est donné en 1833 au théâtre de la Gaieté, La Petite Fadette en 1850 au théâtre des Variétés, Claudie en 1852 au théâtre de la Porte Saint-Martin, etc.

Maurice Sand a son atelier de dessin et peinture au-dessus de l’appartement de sa mère. Il se rend régulièrement chez Delacroix, 54 (aujourd’hui 58) rue Notre-Dame-de-Lorette.

En 1833, Alexandre Dumas, un des premiers habitants du square, (depuis 1831) donne un bal costumé avec trois cents invités. Comme il ne fait rien sans démesure, il a demandé à Delacroix et à d’autres amis peintres de décorer les pièces de son appartement (et de celui de son voisin) à partir de scènes tirées d’oeuvres de lui-même et d’auteurs invités.

On ne peut que terminer cette visite du quartier par une halte au musée de la vie romantique, 16 rue Chaptal.

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L’hôtel de mademoiselle Mars.

Autres adresses dans le quartier :
- la comédienne Marie Dorval habite 44 rue Saint-Lazare de 1833 à 1836 et 40 rue Blanche de 1836 à 1838,
- au 8 rue La Bruyère vit Marceline Desbordes-Valmore entre 1838 et 1840. Elle eut comme amant Latouche, qui embaucha George Sand au Figaro.
- deux autres adresses "romantiques", bien que postérieures à la période qui nous intéresse : 55 rue Pigalle et 66 rue de La Rochefoucauld vivent respectivement Juliette Drouet et Victor Hugo en 1871-1872. Madame Hugo est décédée en 1868. Après ses vingt années d’exil, Hugo connaît d’autres déceptions : la répression qui suit la Commune de Paris, son échec aux élections de 1871 et 1872. Une jeune Sarah Bernhardt lui remonte sans doute le moral.

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N°5 square d’Orléans.

Petite bibliographie
La Nouvelle-Athènes. Promenade littéraire entre la Trinité et la place Saint-Georges. Le Promeneur des Lettres.
Les Hauts lieux du romantisme en France. Colette Becker. Bordas.

[1] Pour ceux qui le liront dans dix ans, sachez que les Jeux olympiques 2004 s’ouvrent à Athènes dans quelques heures !

[2] Non pas dans l’immeuble sur rue, mais dans un hôtel intérieur disparu depuis.

[3] En 1841 dans ses Nouvelles à la main.



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