Ce récit des aventures de Louis Fronsac est une fresque aux rebondissements multiples qui s’étend entre mai 1641 et la mort du cardinal Richelieu, le 4 décembre 1642.
Il voit Louis tomber amoureux [1], s’opposer victorieusement au redoutable cardinal, et être finalement anobli [2] par Louis XIII car il n’a rien fait de moins que de sauver le royaume !
La chambre bleue est celle de la marquise de Rambouillet, surnommée Arthénice. Le poète Vincent Voiture introduit Louis dans ce salon réputé, fréquenté par de nobles comploteurs de tous poils qui en veulent au roi et à Richelieu (la famille de Rambouillet, elle, est fidèle à Louis XIII). S’opposant à leurs projets, Louis va involontairement mais violemment s’affronter à eux, ainsi qu’à leur ennemi Richelieu et à Cinq-Mars, marquis d’Effiat [3].
Nous sommes au printemps 1641. Cinq-Mars a délaissé la courtisane Marion de Lorme depuis l’automne précédent pour se promettre à la duchesse Marie de Gonzague, favorite de la reine Anne d’Autriche. Gaston, l’ami commissaire de Louis, vient lui demander conseil au sujet du mystérieux assassinat d’un certain François Collet, tué en plein jour le 1er mai 1641 entre le Palais Cardinal (aujourd’hui Palais Royal) et la rue Saint-Thomas-du-Louvre où est situé l’hôtel de Rambouillet. Ce Collet était le valet de Julie d’Angennes, fille de Mme de Rambouillet. Sa mort est d’autant plus énigmatique que l’enquête est aussitôt étouffée par Isaac de Laffemas, lieutenant civil depuis 1639 et surnommé par les Parisiens « le bourreau de Richelieu ». Louis découvrira bientôt que Collet a été tué par Rochefort, l’homme de main de Richelieu, après que ce dernier a appris par Julie d’Angennes - ennemie de classe du « marquis » d’Effiat - l’existence de lettres écrites par Cinq-Mars à Marion de Lorme [4].
Cinq-Mars s’y moque du roi, de Richelieu et de Marie de Gonzague. Dérobées à Marion de Lorme par le duc de Vendôme [5], demi-frère de Louis XIII et prétendant au trône, dans le but de faire chanter Cinq-Mars, elles ont été cachées dans un livre appartenant au duc.
Mais, suite à un complot infructueux contre Richelieu, le duc s’est enfui en Angleterre et ses biens ont été confisqués. L’inventaire en est confié à l’étude des Fronsac, qui découvrent la disparition du fameux livre. Ce dernier, saisi par un libraire sans scrupules, a atterri entre les mains du notaire des Rambouillet, qui en a fait cadeau à la marquise. Ce n’est que lorsque Louis récupère l’ouvrage que Julie de Vivonne lui apprend le danger qu’il court et l’existence des lettres secrètes.
Afin de protéger les Rambouillet et Julie de Vivonne - et parce que, en tant que notaire, il ne conçoit pas de céder au plus fort un bien ne lui appartenant pas - Louis remet les lettres à leur propriétaire, Marion de Lorme… qui les confie à nouveau au coffre-fort des Fronsac.
Le jeu devenant trop dangereux, Louis décide, pour les mettre définitivement à l’abri, de les porter à Mazarin - autre habitué du salon d’Arthénice, que lui a recommandé Mme de Rambouillet. Car ces lettres intéressent aussi le futur cardinal, qui aimerait les utiliser pour convaincre Anne d’Autriche de dénoncer les comploteurs et de se rallier au roi.
Mazarin est à Narbonne. Louis s’embarque alors avec Julie de Vivonne pour une périlleuse traversée de la France en plein hiver…
Parcourons Paris Le Mystère de la chambre bleue en main.
La maison et l’étude des Fronsac occupent une grande partie de la rue des Quatre-Fils, près de l’hôtel de Guise. Elles ont un air de ferme fortifiée car leur façade est constituée par un ancien mur d’enceinte. Ce qui n’empêchera pas leurs ennemis de pénétrer dans leur coffre-fort.
Denis Fronsac, frère de Louis, est pensionnaire au collège de Clermont (devenu le lycée Louis-le-Grand, 123 rue Saint-Jacques). Louis y a étudié auparavant, en même temps que son ami Gaston de Tilly et que le futur cardinal de Retz.
Les Mallet et les Bouvier sont les employés des Fronsac. Jeannette Bouvier va le mercredi et le samedi chercher des ingrédients pour sa cuisine aux Grandes Halles et au marché du cimetière Saint-Jean (à l’époque à l’emplacement de la rue du Bourg-Tibourg, sous la rue de la Verrerie).
Le salon de Mme de Rambouillet se trouve rue Saint-Thomas-du-Louvre entre 1613 et 1664 [6]. Surnommée Arthénice, elle reçoit tous les après-midi et soirs. On peut y voir Richelieu, La Rochefoucauld, Chapelain, Voiture (qui habite en face), Mazarin, Racan, Vaugelas, Malherbe, Honoré d’urfé, Ménage, Madeleine de Scudéry, Mme de Sévigné, Mme de Lafayette, Bossuet, Molière, Scarron, Tallemant des Réaux, etc.
A l’angle de la rue Saint-Martin et de la rue Saint-Merry est située l’étude du notaire de Mme de Rambouillet, qui lui a fait cadeau de l’ouvrage dérobé au duc de Vendôme dans lequel sont dissimulées les lettres secrètes de Cinq-Mars.
L’hôtel du duc de Guise est toujours debout rue du Chaume (aujourd’hui rue des Archives), aussi magnifique qu’un palais. Les Guise sont plutôt des opposants à Richelieu.
L’enterrement de François Collet se déroule dans l’église Saint-Germain-l’Auxerrois.
Fronsac habite dans une petite impasse transversale à la rue des Blancs-Manteaux.
Le « mousquet du père Diron », pistolet à air comprimé qui a tué Collet a été conçu pour Richelieu par un père du couvent de la rue des Minimes.
Louis se rend le 20 mai 1641 au Palais-Cardinal (aujourd’hui Palais royal), réel centre du pouvoir car le Louvre et le château de Saint-Germain-en-Laye ne sont que des lieux de séjour temporaire du roi. Il fait remettre à Richelieu une lettre dans laquelle il demande la restitution immédiate des lettres de Cinq-Mars, dont des hommes de main du cardinal viennent de s’emparer en pénétrant dans l’étude des Fronsac rue des Quatre-Fils. Devant les arguments solides de Louis, Richelieu s’exécute !
Gaston d’Orléans habite le château du Luxembourg (le Sénat actuel). Son occupation préférée consiste à comploter contre son frère Louis XIII, avant de dénoncer ses complices et de se réconcilier avec lui au dernier moment.
A connaître : www.polarhistorique.com, le blog sur le roman policier historique.
[1] De Julie de Vivonne, nièce de la marquise de Rambouillet.
[2] Il est fait chevalier de Saint-Michel. Le roi lui offre une seigneurie royale abandonnée à Mercy, non loin de l’abbaye de Royaumont.
[3] Surnommé « monsieur le Grand » après qu’il a obtenu la charge de Grand Écuyer du roi, Cinq-Mars est le favori de Louis XIII. Il est devenu l’ennemi déclaré de son ancien soutien, Richelieu.
[4] Ces lettres sont, comme il reconnaît lui-même, pure invention de l’auteur, Jean d’Aillon.
[5] Plusieurs des alliés du duc de Vendôme dans ce complot se retrouveront l’été 1641 dans d’autres manœuvres dirigées par le comte de Soissons et le duc de Bouillon et destinées à soumettre Richelieu et remplacer le roi par une régence d’Anne d’Autriche, avec l’aide des armées espagnoles, de la reine elle-même, ainsi que du frère du roi, Gaston d’Orléans ! Début juillet, juste après avoir vaincu près de Sedan l’armée du roi commandée par le maréchal de Châtillon, Soissons se tue accidentellement en se grattant la tête avec un pistolet chargé !…
Pour bien comprendre le cadre historique de l’époque, donnons la parole à Jean d’Aillon : « Depuis vingt ans, les intrigues se succédaient à la cour, ces manœuvres, organisées en général par les grands du royaume, c’est-à-dire par la très haute noblesse visaient la politique de Richelieu et étaient, en général, financées par la maison d’Autriche.
Rarement, dans le passé, autant de conjurations, de cabales s’étaient déployées en France pour abattre un Premier ministre. Ces machinations s’enchaînaient et suivaient généralement le même déroulement pour aboutir à la même fin. Beaucoup mettaient en cause les favoris du roi.
Voici quel était ce cheminement : Louis XIII, personnage complexe et tourmenté, se plaignait amèrement du Cardinal à son favori ; quelques Grands pensaient qu’il était opportun d’agir ; ils organisaient – parfois avec le soutien d’un pays tiers – des rebellions dans le royaume ; les rebelles assuraient le roi de leur fidélité, ils ne demandaient que la fin de la dictature du Grand Satrape [Richelieu].
Mais il y avait toujours méprise ! Jamais – jusqu’à présent – le roi n’avait voulu se débarrasser de son ministre. C’était alors le tragique dénouement : l’exil, la prison et les exécutions capitales. »
Le Mystère de la chambre bleue, chap. 2.
[6] A peu près sous l’actuelle pyramide de Peï dans la cour Napoléon du musée du Louvre (la rue Saint-Thomas du Louvre prolongeait à l’époque la rue de Valois en direction de la Seine). « L’hôtel de Rambouillet se situait dans la rue Saint-Thomas du Louvre. Cette voie, aujourd’hui disparue, partait de la façade de l’actuel Palais-Royal (à l’époque ce n’était que le Palais-Cardinal) et se dirigeait vers la Seine en s’enfonçant dans un dédale de maisons construites contre le Louvre ; elle était donc disposée approximativement à l’emplacement de notre actuelle place du Carrousel. Sur le côté vers les Tuileries, la rue était constituée principalement de deux grands hôtels particuliers : celui de Chevreuse et celui de Rambouillet. Ces deux hôtels jouxtaient l’hôpital des Quize-Vingt et comptaient parmi les plus beaux de Paris. » Le Mystère de la chambre bleue, chap. 2).