Ce sont des études de droit, mais aussi un chagrin d’amour nantais et, bien sûr, la volonté de réussir dans les lettres, qui amènent Jules Verne à Paris en 1848. Et une révolution l’y attend.
L’objet du chagrin d’amour est la belle Herminie, vingt ans comme Jules, et amoureuse de lui aussi. Mais un écrivaillon n’est pas un beau parti pour une jeune bourgeoise nantaise, et Herminie en épouse rapidement un meilleur.
Contre la bourgeoisie et contre Nantes (où, à part des visites à sa famille, il ne revient vivre quelques mois qu’en 1877), Verne gardera de cette histoire une longue rancune.
La révolution, c’est celle des journées sanglantes des 23 au 26 juin 1848, provoquées par la maladroite suppression des Ateliers nationaux décidée par la seconde République, et qui mèneront à l’élection de Louis-Napoléon Bonaparte. L’amertume que Verne ramène de Nantes et le fait qu’il vive au siècle du romantisme et des écrivains engagés, ne font pas pour autant de lui un révolutionnaire. Il est vrai qu’il vient de rater la génération des Dumas, Hugo, Lamartine, Michelet, Sand, Sue… pour qui art et engagement politique vont de pair. Et puis il a surtout la tête à ses essais de romans et de drames. Quoi qu’il en soit, lorsqu’il arrive à Paris en juillet pour passer des examens de droit, l’ordre vient d’être rétabli, et il observe sur les façades les traces des balles et des boulets en spectateur désabusé et pas vraiment enthousiaste. Il exprimera les mêmes sentiments pour la commune de 1871.
L’écrivain vit entre 1848 et 1869 dans une capitale qui se prépare aux grands réaménagements de Napoléon III et du baron Haussmann :
Fin 1848, il s’installe donc au 3e étage du 24 rue de l’Ancienne Comédie (numéro disparu aujourd’hui) afin de poursuivre ses études de droit. Il obtient son titre d’avocat en 1850, bien que son énergie se dépense surtout dans l’écriture et la fréquentation des milieux littéraires. Il fait ainsi la connaissance de l’explorateur-écrivain Jacques Arago devenu aveugle, frère de François, d’Étienne et de Jean.
La famille Verne demande à Jules de rentrer à Nantes ou de choisir une étude de notaire parisienne pour y travailler comme clerc. À la fois têtu et angoissé (ce qui déclenche en 1851 des premières crises de paralysie faciale), il refuse.
La revue Le Musée des familles, dirigée par Pitre-Chevalier, publie en 1851 et 1852 trois premières nouvelles signées Jules Verne.
Il vit ensuite dans le quartier Notre-Dame-de-Lorette jusqu’à 1853 où, après avoir été embauché grâce à Dumas Fils comme secrétaire du directeur du Théâtre lyrique (ex-Théâtre historique de Dumas Père), il emménage 11 boulevard Bonne-Nouvelle, puis au 18, au 6e étage. Cet emploi, qu’il occupe de 1851 à 1855, l’autorise à faire jouer ses pièces au Théâtre lyrique.
C’est l’époque des succès d’Offenbach, et Verne tente de surfer sur la vague en écrivant des opérettes. Tout cela étant bien gentil mais pas très rémunérateur, il devient en 1856 placier en Bourse, pour un agent de change basé 72 rue de Provence.
Avec sa jeune femme Honorine, il s’installe 18 boulevard Poissonnière en 1857 et quelques mois plus tard rue Saint-Martin.
Entre 1860 et 61, les voilà 54 rue du faubourg Montmartre, puis 45 boulevard de Magenta, puis 18 passage Saulnier.
À l’automne 1862, il rencontre l’éditeur Pierre-Jules Hetzel dont les bureaux se trouvent 18 rue Jacob, et lui remet le manuscrit d’Un Voyage en l’air, qui devient Cinq semaines en ballon.
Verne vient d’inventer - il en est conscient - un nouveau type de roman : l’aventure géographique, à la croisée du romantisme, des romans exotiques et du positivisme de l’époque.
D’où lui est venue l’idée ? Il y a bien sûr sa collaboration avec Le Musée des familles et les encouragements de Jacques Arago ; ses voyages, dont le premier véritable date de 1859 en Ecosse, puis en Scandinavie en 1861 ; il observe et note tout ; il y a l’influence d’Edgar Poe, que Verne étudie et qui vient d’inventer lui aussi un nouveau genre romanesque avec ses enquêtes criminelles et scientifiques ; il y a l’intérêt que porte à ce premier Voyage extraordinaire Pierre-Jules Hetzel, éditeur déjà célèbre et qui signe un contrat avec Verne dès le rapide succès de Cinq semaines en ballon.
En 1863, les Verne emménagent 39 rue La Fontaine. Ils demeurent jusqu’en 1869 et quittent alors Paris pour Le Crotoy (précisément la maison La Solitude, rue Lefèvre à deux pas du port, aujourd’hui 9 rue Jules Verne).
Avec le bateau qu’il vient d’acheter, il remonte la Seine jusqu’à Paris durant l’été 1870 et stationne dix jours au pied du Pont des Arts, juste avant la déclaration de guerre à la Prusse et la capitulation de Napoléon III à Sedan.
En 1871, ils s’établissent pour la vie à Amiens. Pour l’écrivain, Amiens est comme la grande banlieue de Paris. Il y est tranquille pour écrire, et la poste ou le train permettent de garder une relation étroite avec son éditeur, avec ses amis et les théâtres qui commencent enfin à s’intéresser à lui. En effet, alors que les Voyages extraordinaires continuent de se succéder, le succès du Tour du monde en quatre-vingt jours en 1872 ramène l’écrivain vers son premier amour : la scène. Le roman est adapté en pièce et fait salle comble au théâtre de la Porte-Saint-Martin à Paris (18 bd Saint-Martin). D’autres de ses romans sont adaptés au théâtre du Châtelet.
Lorsque Verne se rend à Paris pour rencontrer Hetzel ou voir jouer ses pièces, son hôtel de prédilection est l’Hôtel du Louvre, place André Malraux face à la Comédie française.
Autres demeures de l’auteur
Le père des Voyages extraordinaires a également vécu à Nantes, à Amiens, au Tréport…
Pour visiter le lieu
Il faut aller à Nantes et à Amiens voir les très beaux musées Jules Verne.
Quelqu’un à contacter ?
Le Centre international Jules Verne.
Petite bibliographie
Jules Verne l’enchanteur. Jean-Paul Dekiss, édition Le Félin, 2002, 11 euros.