Avec les aventures de Victor Legris, nous ne pénétrons pas dans les couloirs du pouvoir de la IIIe République, mais dans les allées de l’exposition universelle de 1889, dans les bureaux de la presse quotidienne (cinq ans avant l’affaire Dreyfus) et dans les milieux de l’art, aux premiers temps de l’impressionnisme.
Mystère rue des Saints-pères est le premier opus de la série des Mystères parisiens, et Victor est libraire dans cette rue.
Le mystère auquel il s’attaque est double : de mystérieuses morts se succèdent dans la capitale en mai et juin 1889, apparemment causées par des piqûres d’abeilles.
D’autre part, le comportement de son associé et père adoptif Kenji Mori est des plus étranges. Il a en effet croisé plusieurs fois le chemin des victimes… tout comme la belle Tasha Kherson, illustratrice pour le Passe-partout, journal à sensations auquel Victor commence à collaborer. Les victimes - sauf la première - ainsi que Kenji et Tasha possèdent en outre le point commun d’avoir retiré le 22 juin à la tour Eiffel une édition spéciale du Figaro imprimée à l’occasion de l’exposition universelle.
Intrigué par les comportements étranges de ses proches, Victor se lance sur la piste.
Parcourons donc la capitale en sa compagnie et découvrons les charmes de la ville en 1889.
Le 22 juin 1889, Eugénie Patinot, demeurant 35 avenue des Peupliers à Auteuil, décède brutalement au 1er étage de la tour Eiffel. Apparemment d’une piqûre d’abeille ! Victor récupère plus tard un indice auprès de ses neveux : une aiguille de tatouage semblable à celles que possède son ami Kenji.
C’est au 1er étage de la tour Eiffel que nous faisons connaissance le 22 juin 1889 avec Victor Legris. En compagnie de son associé libraire Kenji Mori, il y rencontre son ami Marius Bonnet qui vient de fonder un nouveau journal, le Passe-partout… qui se lance aussitôt dans l’enquête sur cette mort mystérieuse.
L’enquête se clôt le 1er juillet 1889 au même endroit, en présence de Gustave Eiffel en personne. Il y a mort d’homme, mais c’est la dernière, et c’est celle du meurtrier. Il faudra tout de même sa confession posthume, publiée par le Passe-partout, pour comprendre ses mobiles.
Lorsque Victor doit faire reposer son cerveau bouillonnant pour avancer dans son enquête, il aime déambuler dans le jardin des Tuileries.
Le 12 mai 1889, Jean Méring, un chiffonnier décède d’une piqûre semblable à celle d’une abeille, encore une fois. Il assistait à l’entrée de la troupe de Buffalo Bill dans la gare des Batignolles (aujourd’hui la gare de Pont-Cardinet).
Jean Méring habitait rue de la Parcheminerie, dans un bâtiment qui communique avec la rue de la Harpe. Un autre meurtre y sera commis le 28 juin et, le lendemain, Victor, que son enquête amènera ici, y échappera de peu à la mort.
Le Passe-partout a ses bureaux galerie Véro-Dodat, non loin de la rue Croix-des-Petits-Champs.
La librairie Elzévir de Legris et Mori se trouve 18 rue des Saints-pères. Victor en a hérité de son oncle Émile, utopiste admirateur de Fourier. Chacun des deux libraires y possède un appartement au-dessus. Mori, adepte du jiu-jitsu, a élevé Victor, qui a perdu son père - un être froid et distant - à huit ans. Victor s’est installé au sous-sol un laboratoire pour assouvir sa passion : la photographie. Dans l’enquête sur les morts subites du roman Mystère rue des Saints-pères, Kenji joue un rôle tantôt de suspect, tantôt de limier.
Le roman permet bien sûr au lecteur de visiter l’exposition universelle de 1889, du palais du Trocadéro au champ de Mars. Le long du quai d’Orsay se tient aussi une exposition sur l’habitat à travers les siècles, et l’esplanade des Invalides accueille les productions de la France coloniale.
Tasha Kherson, illustratrice pour le Passe-partout, vit au 6e étage du 60 rue Notre-Dame-de-Lorette. Séduisante, elle l’est sans aucun doute, et Victor ne peut lui résister. Mais tout porte à croire qu’elle est mêlée aux morts suspectes. D’ailleurs son voisin serbe Danilo, chanteur d’opéra à ses heures, ne semble pas très clair non plus. Pourtant, Danilo finira comme les autres victimes.
Kenji se rend mystérieusement chez un autre libraire, rue Auber. Victor, intrigué, l’a suivi. Kenji se rend ensuite au Café de la Paix, boulevard des Capucines, et remet un paquet à inconnu qui se révèlera être un collectionneur d’art, bientôt victime d’une mort prématurée. Il devait également déjeuner au restaurant du Grand hôtel avec John Cavendish, décédé lui aussi prématurément. Kenji termine son parcours énigmatique par des emplettes dans une boutique de cadeaux pour femmes rue de la Chaussée-d’Antin.
Victor se rend à la librairie Hachette, 77 boulevard Saint-Germain, pour consulter les récits de voyage de l’explorateur américain Cavendish, décédé brutalement le 24 juin 1889 à l’exposition coloniale… piqué par une abeille, bien sûr.
Tasha emmène Victor à la brasserie des Martyrs, 5-7 rue des Martyrs. Il ne sait pas très bien s’il peut lui faire confiance ou pas.
Juste après l’avoir quittée, il la suit jusqu’à un hôtel particulier, au style hindou, planté dans la plaine Monceau en face de l’adresse qu’occupe Guy de Maupassant (10 rue Jacques Bingen) entre avril 1884 et décembre 1889, non loin de la demeure de Dumas Fils, 98 avenue de Villiers.
Cet hôtel appartient à Ostrovski, un collectionneur d’art… que Victor reconnaît comme étant l’inconnu rencontré par Kenji au Café de la Paix, et qui va bientôt être assassiné, lui aussi.
Il retrouve Tasha à La Chapelle de Thélème, en haut de la rue Lepic, guidé par le père Tanguy, marchand de couleur au 14 rue Clauzel. Ce sont ses deux premiers pas dans la découverte de la peinture impressionniste.
Alors que la liste des morts suspectes par piqûres d’abeilles continue de s’allonger, Kenji Mori s’absente de la rue des Saints-pères pour une raison inconnue. Il prétend aller à Londres mais loue une chambre à l’Hôtel du Chemin de fer du Nord, boulevard de Denain.
Il rend visite à un ami antiquaire, qui tient boutique rue de Tournon, à quelques mètres du restaurant Foyot, au n°33 de la rue. On y apprend alors que Kenji connaissait Ostrovski, encore une autre victime mystérieusement décédée.
Sources :
Mystères rue des Saints-pères. Claude Izner. Editions 10/18.
Les écrivains de la Plaine Monceau. www.lireetpartir.com.
A connaître : www.polarhistorique.com, le blog sur le roman policier historique.