Le conte d’Auguste est l’histoire d’un petit homme brillant par son intelligence plus que par sa beauté [1], très fier de lui et voulant apporter la lumière à l’humanité.
C’est vrai, son intelligence, ses intuitions et sa capacité de travail sont impressionnantes. Pendant la plus grande partie de sa vie, il va tendre son esprit comme un arc, à la recherche des lois qui mènent l’Histoire et les sociétés.
Après avoir rencontré un grand homme, autre comte, il découvre en 1822 les bases d’un grand système scientifico-moralo-politico-religieux qui en impressionnera plus d’un (surtout après sa mort) : le positivisme, et invente par là-même (en 1839) le terme et le concept de sociologie.
Un drame de sa vie est de n’être pas sorti diplômé de l’école Polytechnique, suite à un conflit entre les élèves et l’école qui conduit les étudiants de la promotion 1816 à se voir privés du titre prestigieux (Comte ne sera que répétiteur, et non professeur, à l’école Polytechnique).
L’autre drame, c’est l’amour et la mort de Clotilde…
Comte habite 36 rue Bonaparte de 1818 à 1822. Entre 1817 et 1824, il est, après Augustin Thierry, secrétaire du comte de Saint-Simon. Le comte voulait réécrire L’Encyclopédie (il voulait aussi épouser madame de Staël). Il est grand agitateur d’idées progressistes, à travers ses écrits et ses périodiques aux titres évocateurs : Le Politique, L’Organisateur, L’Industrie, etc. Comme Auguste, ce comte choisit de poursuivre ses recherches et son œuvre, quitte à être pauvre, souvent solitaire et parfois proche du suicide (pour le comte) ou de la folie (pour Comte). Saint-Simon pense que le libéralisme doit être remplacé par un industrialisme un peu plus ordonné.
En 1822, c’est, pour Auguste, l’illumination : les sociétés comme les individus passent tous par trois âges successifs : le "théologique", le "métaphysique" et le "positif", ou "scientifique". Par exemple, la Révolution de 1789 a marqué le passage, pour la société française, de l’état théologique à l’état métaphysique. L’enjeu de la sociologie, que Comte commence à construire, est d’atteindre l’état positif, c’est-à-dire le stade de la connaissance qui permet de comprendre, de prévoir et d’agir sur les lois qui régissent la société.
En 1824, Comte rompt avec Saint-Simon. Le disciple veut ses propres disciples.
Il emménage au milieu des années 1820 13 rue du Faubourg Montmartre avec sa jeune femme, Caroline, puis 159 rue Saint Jacques de 1828 à fin 1833, 9 rue de Vaugirard entre 1835 et fin 1837, 18 rue des Francs Bourgeois-Saint-Michel (aujourd’hui partie haute de la rue Monsieur le Prince) et 5 rue d’Ulm de 1838 à 1841.
Entre 1841 et sa mort en 1857, le philosophe demeure 10 rue Monsieur-le-Prince. Il y fait installer une glace devant sa table de travail, pour se regarder penser… Cet appartement est illuminé par la présence de Clotilde de Vaux, sa muse et son inspiratrice à partir de 1844.
Au 3ème étage du 5 rue Payenne vit et meurt en 1846 Clotilde. Le lieu a depuis été transformé en chapelle du souvenir.
Les dernières années de Comte, après la mort de Clotilde, sont consacrées à l’élaboration de ce qui a davantage inspiré des leaders politiques ou pseudo-religieux que des philosophes et sociologues : la Religion de l’humanité et la sociocratie (disons : une démocratie scientifique et autoritaire).
Pour visiter le lieu
L’appartement du 10 rue Monsieur-le-Prince peut être visité sur demande à la Maison Auguste Comte au 01 43 26 08 56. En souvenir de Clotilde, le philosophe a souhaité qu’il soit préservé après sa mort. Les livres n’y sont pas légion, car Comte avait renoncé à toute lecture pour se consacrer entièrement à ses cours et à son œuvre.
Petite bibliographie
Les voix de la liberté, les écrivains engagés au XIXe siècle. Michel Winock, Editions Seuil.
[1] Ses condisciples de Polytechnique l’appelleront Sganarelle.