Entre le 9 décembre 1772 et le 30 avril 1773, le marquis vit dans une cage dorée (pour l’époque) du château de Miolans, mais une cage tout de même.
Il a 32 ans et c’est une sale affaire qu’il a organisée à Marseille en 1772 avec son valet Latour et quatre prostituées qui l’a mené là. Les prostituées, auxquelles il a fait consommer des aphrodisiaques, ont eu peur d’être empoisonnées et ont porté plainte. Sade s’est enfui dans son château de Lacoste. Sa femme l’exile en Sardaigne pour échapper à la condamnation à mort par contumace qui le frappe bientôt, lui et Latour (le premier doit avoir la tête tranchée, le second doit être pendu).
Accompagné de Latour et de sa belle-sœur qu’il fait passer pour sa femme, le marquis voyage à Nice, Gênes, Venise, Turin puis Chambéry (les Etats de Savoie ne sont pas encore rattachés à la France). Il y séjourne sans doute rue Croix d’Or, puis dans une maison aux portes de la ville.
Pour s’assurer qu’il ne rentre pas en France au péril de sa vie, sa belle-mère obtient du roi de Sardaigne que Sade soit arrêté et enfermé dans le château de Miolans, en compagnie de Latour. Ses cinq mois de détention sont bien connus grâce à une abondante correspondance entre le marquis, ses proches et différentes autorités de France et de Sardaigne.
Il est traité ici avec les égards dus à son rang. Il occupe la cellule du Trésor, que l’on peut encore voir aujourd’hui, de préférence à celles du Purgatoire et de l’Enfer… et fait venir mobilier et nourriture de l’extérieur. Il reçoit des invités à dîner (d’autres prisonniers et son gardien Ducloz), joue avec eux à des jeux d’argent, etc.
Mais Sade demande davantage : que sa correspondance ne soit pas surveillée… et qu’il retrouve carrément la liberté. Dès le début 1773, il est clair pour le commandant de la prison qu’il organise les moyens de son évasion.
Le soir du 30 avril, Sade, Latour et un troisième prisonnier s’échappent par une fenêtre sans grille de l’appartement de Ducloz.
Ce n’est ni son premier, ni son dernier séjour en prison, loin de là…
Source : La Captivité du marquis de Sade et son évasion, article tiré le l’ouvrage Miolans, 2000 ans d’histoire, n° hors série de la revue L’Histoire en Savoie, réédité en 1991, en vente au château. Cet article est un résumé de l’étude du chanoine Naz publiée en 1965 dans le tome 79 des Mémoires et documents de la Société savoisienne d’histoire et d’archéologie. L’étude se retrouve aussi dans le tome I de la Vie du marquis de Sade par Gilbert Lély, Paris, Gallimard, 1952.