Denis DIDEROT

à Langres, Paris, Sèvres…
Le jeudi 14 août 2003.

Paris, 3 rue de l'Estrapade.

"Se jeter dans les extrêmes,
voilà la règle du poète.
Garder en tout un juste milieu,
voilà la règle du bonheur."
Diderot, Salon de 1767.

C’était une époque où l’on pouvait encore être curieux.
Mais curieux comme ça ! À partir d’un fait, d’une lecture, d’une parole, mettre en route son esprit critique, dénicher la superstition, confronter les thèses contraires,… c’est ainsi que Diderot conçoit une Lettre sur les aveugles après avoir assisté à une opération de la cataracte, qu’il écrit un Supplément au voyage de Bougainville parce qu’un navigateur ramène un récit exotique de son dernier voyage, et qu’il se lance dans une gigantesque Encyclopédie parce que personne ne l’a fait avant lui.

Denis naît à Langres en 1713, dans une maison située aujourd’hui 6 place Diderot.
Son père, maitre coutelier ayant réussi, aurait voulu que son fils soit prêtre. Le frère entrera dans les ordres, mais Denis…
C’est néanmoins l’autoritaire bonté de son père qui, en partie, amènera plus tard le philosophe à contester beaucoup de choses mais pas l’amour filial.
Pour le moment, il est élève au collège des Jésuites de Langres.
En 1728, à 15 ans, il arrive à Paris, qu’il ne quittera que pour de courts séjours jusqu’à sa mort. Jusqu’à 1732, il est élève au collège d’Harcourt, l’actuel lycée Saint-Louis. Lorsqu’il se détourne des ordres, son père lui coupe les vivres. Il est écrivain public et pratique différents métiers, en errant à droite et à gauche pendant une dizaine d’années.

Ses adresses : on le trouve devant le couvent des Cordeliers, rue de l’Observance (devenue rue Antoine-Dubois) puis au coin de la rue Saint-Jacques - rue des petits métiers et des libraires - et de la rue de la Parcheminerie, ou bien au café Procope, lieu d’informations incontournable à une époque où les journaux sont encore rares ; en 1741, il loge rue du Vieux Colombier ; quelques mois plus tard, rue des deux Ponts, dans une pauvre chambre.
En 1742, il fait connaissance avec Rousseau, qu’il côtoiera jusqu’en 1759.
Ses séjours à Langres, région chère à son coeur, sont provoqués par des questions de famille : en 1742-43, il y vient demander à son père l’autorisation (qu’il n’obtient pas) de se marier avec Nanette (Antoinette) Champion. On l’y revoit à l’automne 54, puis en 59 et en 70.

En 1743, il emménage rue Saint-Victor avec Nanette, épousée secrètement (la famille Diderot ne l’apprend que six ans plus tard).
À partir de 1746, on les trouve rue Traversière (devenue Rotrou) puis rue Mouffetard, puis au second étage du 3 rue de l’Estrapade, qui n’en comportait alors que trois. Pour vivre, Diderot effectue des traductions de l’anglais vers le français. En 1746, on lui propose de traduire une encyclopédie anglaise parue en 1728. Pourquoi ne pas carrément la recomposer ? C’est le début d’une œuvre glorieuse mais peu rémunératrice, qui s’achèvera en 1766…
C’est de la rue de l’Estrapade qu’il est conduit pour trois mois au donjon de Vincennes en 1749. Il vient d’écrire la Lettre sur les aveugles (ses Pensées philosophiques, plus newtoniennes et déistes qu’athées, se sont déjà fait remarquer par leur originalité en 1746…). Rousseau le visite régulièrement au donjon - et un jour, chemin faisant, tombe sur le concours lancé par l’Académie de Dijon, qui déclenche la conception du Discours sur les Sciences et les Arts.
Pour sortir de Vincennes, Diderot promet de ne plus violenter la religion et les bonnes moeurs. L’Encyclopédie paraît être une plus sage occupation, quoique ses deux premiers tomes soient d’abord interdits en 1752 par le roi, avant d’être autorisés après l’intervention de Madame de Pompadour et de plusieurs ministres.

À partir de 1754 ou 1755, le voilà aux 4e et 5e étages rue Taranne, détruite depuis par le percement de la rue de Rennes et du boulevard Saint-Germain (la maison de Diderot aurait été située au niveau du 149 du boulevard, près de la brasserie Lipp).

Sa dernière demeure lui est trouvée par l’impératrice de Russie qui, pour lui éviter de monter les étages, l’aide à emménager dans l’hôtel de Bezons, 39 rue de Richelieu, près du Palais Royal. Mais il n’y habite que douze jours en juillet 1784 avant de décéder. La façade de l’hôtel est toujours là.

Autres demeures de l’auteur
Pour Diderot qui n’aime pas voyager, le château du Grandval à Sucy-en-Brie est juste assez loin. Il y séjourne, chez son ami le baron d’Holbach, en octobre 1759, puis en octobre 1760, en novembre 1775 et en août 1780. Là, il travaille beaucoup et écrit de belles lettres à sa chère Sophie Volland. En 1755, il séjourne également au château d’Isle-sur-Marne, près de Vitry-le-François. On le voit aussi au château de la Chevrette à Deuil-la-Barre près de Montmorency, propriété de Madame d’Epinay, maîtresse de Grimm et amie de Rousseau ainsi qu’à Sèvres, 26 rue Troyon, dans la maison de son ami le joaillier Belle, où il vient habiter régulièrement pendant les dix dernières années de sa vie.

Pour visiter le lieu
La maison natale de Diderot se trouve 6 place Diderot à Langres (52200) mais ne se visite pas. Il ne reste ajourd’hui du château du Grandval que la ferme du château, devenue le Centre culturel de Sucy-en-Brie (tel. 01 45 90 25 12).
Le musée de La Chevrette de Deuil-la-Barre est situé dans l’ancienne conciergerie du château, démoli en 1786. Il donne un aperçu de ce qu’était le château à l’époque où Madame d’Épinay y accueillait Rousseau et les encyclopédistes (rue Jean Bouin, tél. : 01 34 28 60 41).

Petite bibliographie
Demeures du temps retrouvé. Albert Fournier, Les Éditeurs français réunis, 1971.
Denis Diderot au Grandval. Article de Georges Viard dans Balade sur les pas des écrivains en Val-de-Marne, Éditions Alexandrines, 2000.

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