Walter SCOTT à Paris

Le samedi 27 janvier 2007.

« [Walter Scott] dispose de son lecteur comme le vent dispose d’une feuille. »
Littérature et philosophie mêlées. Victor Hugo, juin 1823.

Le futur écrivain naît en 1771 à Edimbourg. Son enfance baigne dans les récits historiques dans lesquels ses ancêtres se sont illustrés : histoires de révoltes, de guerres civiles… Un arrière grand-père de Walter a combattu aux côtés des jacobites pour la restauration des Stuarts sur le trône d’Ecosse. Walter lui-même recueille des témoignages des survivants de la dernière révolte jacobite de 1745 menée par Charles Édouard Stuart (Bonnie Prince Charlie), anéantie l’année suivante à Culloden. Sa formation à l’université d’Edimbourg lui fait comprendre que le système juridique que chaque peuple s’est construit au fil des siècles incarne son identité culturelle, dont il entend bientôt révéler par le roman historique la spécificité, la filiation et les perspectives de progrès.

Walter Scott n’effectue dans sa vie que deux séjours en France : dans le Paris occupé de 1815 [1], après être passé par la Belgique (Bruxelles et Waterloo) et en 1826.

Entre ces deux années, il est devenu un auteur de best-sellers. Les premières traductions de ses romans en français paraissent en 1816 (Guy Mannering traduit par Joseph Martin) et 1817 (The Antiquary traduit par Sophie de Maraise et J.-B. Defauconpret ; The Puritans, traduits par J.-B. Defauconpret).

A 55 ans, sa seconde visite sur le continent est motivée par ses recherches pour son ouvrage sur la vie de Napoléon Bonaparte. Il en a gardé plusieurs traces dans son Journal.

Il s’installe le 29 octobre à l’hôtel Windsor, rue de Rivoli. Des articles de journaux ponctuent son séjour, certains louangeurs, d’autres critiques. Quelques-uns ont même précédé son arrivée.
Les cartes de visite affluent bientôt à l’hôtel Windsor, d’illustres ou moins illustres personnages qui espèrent l’honneur d’un autographe.

Scott assiste le 30 au soir à la pièce Rosemunde à la Comédie Française, où il apprécie le jeu des acteurs, tout en ne comprenant pas tout.

Le lendemain, le voilà au Louvre, à Notre-Dame et au Palais de Justice, et le soir au théâtre de l’Odéon, où il assiste à l’opéra de Rossini inspiré de… Ivanhoe ! Les costumes et les acteurs l’impressionnent encore, mais il apprécie moins les dialogues.
La pièce est malgré tout un succès, et la librairie Sautelet qui, place de la Bourse, édite le roman, fait de belles affaires.

Les Scott dînent le 1er novembre chez Lord Granville, l’ambassadeur du Royaume-uni dont la résidence est celle qu’occupait Lord Castlereagh en 1815, 30 rue du Faubourg-Saint-Honoré. Scott note dans son Journal que le bâtiment appartenait auparavant à Pauline Borghese et que, "si ses murs pouvaient parler, ils nous raconteraient des histoires étonnantes."

L’écrivain rencontre le 3 novembre James fenimore Cooper, qui l’invite à se faire davantage connaître aux Etats-Unis, proposition à laquelle Scott ne donnera pas vraiment suite.

Le lendemain, il se rend aux Tuileries et voit la famille royale se rendre à la chapelle. Charles X lui adresse quelques mots. Les journaux reprennent aussitôt la nouvelle.

Scott quitte la capitale le 7 novembre 1826, après avoir reçu la veille, des mains de son auteur, un exemplaire dédicacé du Cinq-Mars d’Alfred de Vigny. Ce dernier est accompagné par l’oncle de Lydia, la jeune anglaise qu’il a épousée en 1825.
Vigny ne maîtrise pas encore très bien l’anglais, ni Scott le français.
Vigny trouve l’écrivain écossais "affectueux et modeste, presque timide ; mais souffrant, mais affligé, mais trop âgé, ce que je n’attendais pas. Cela m’a fait peine" [2]. Vigny aimerait beaucoup avoir l’avis de Scott - à ses yeux le père du roman historique - sur son roman, mais ce dernier ne s’engagera pas dans une correspondance.

Sources :
- www.electricscotland.com/ssf/Scot%20Trad%202000.pdf
- Journal of Walter Scott http://arthurwendover.com/arthurs/scott/vol_i.html,
- Krulic, Brigitte, Fascination du roman historique, Editions Autrement, 2007.

[1] Séjour dont il parle dans Paul’s Letters to his Kinsfolk.

[2] Lettre à Adolphe Saint-Valry, 7 novembre 1826.



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