La Grande Chaumière, n°201 à 209 boulevard Raspail [1] et 112 à 136 boulevard du Montparnasse.
Par Bernard Vassor
« Pomaré, Maria,
Mogador et Clara,
A mes yeux enchantés,
Paraissez belles divinités.
Messieurs les étudiants,
S’en vont à la Chaumière,
Pour y danser le Cancan,
Et la Robert-Macaire.
Toujours, toujours Triomphant des amours
Et ioup ! ioup ! ioup ! la la… »
(Frédéric Soulié)
Dans un petit hameau du côté de Montparnasse,un anglais nommé Tickson avait fondé le célèbre bal-jardin. Il s’était associé avec un restaurateur Edouard Fillard qui possédait un restaurant sur les lieux. Ils ouvrirent une sorte de parc d’attraction : boutiques, manèges, montagnes russes, baraques de tir, cafés, restaurants et bals, à l’imitation du Prater de Vienne et du Tivoli.
C’était un ensemble de cabanes à toits de chaume qui furent remplacées par des maisons à étages.
Le gendre de Fillard leur succéda et il vendit en 1837 « la Chaumière » au Père Lahire, un colosse doté d’un force prodigieuse, qui assurait à lui seul le maintien de l’ordre dans son établissement.
Pour concurrencer le bal Mabille, le nouveau propriétaire fit une nouvelle décoration :
au bout d’une allée bordée d’une double rangée de caisses d’orangers, l’emplacement de la danse fut bitumé, macadamisé, sablé et entouré de balustrades peintes en vert pour protéger les petites tables réservées aux consommateurs.
Pour le public populaire, le prix d’entrée était de cinquante centimes le samedi et le dimanche, mais le lundi on demandait deux francs pour la clientèle huppée.
Le succès fut tout de suite extraordinaire, on disait à l’époque que le boulevard Montparnasse était « le boulevard conduisant à la Grande Chaumière ».
Il aurait été fréquenté, selon Hilairet, par Girardin, Barbès, Jules Favre et… Thiers dans sa jeunesse.
Hélas, la concurrence de Bullier qui avait crée ce qui allait devenir « la Closerie des Lilas », et la spéculation foncière, allaient avoir raison du bal champêtre du Père Lahire.
[1] Boulevard d’Enfer en 1760, puis Raspail en 1887.