Balade dans le Paris de 1667 sur les pas des Croix de paille

Le mercredi 14 mars 2007.
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Le pont Neuf, avec la statue de Henri IV et, au fond, l’emplacement de l’ancienne pompe de la Samaritaine.

Avril 1667. Louis XIV rêve à Versailles. Dieudonné Danglet, lui, vit de petit boulot en petit boulot à Paris et dans les environs lorsqu’il est renversé sur la route de Saint-Denis par le carrosse de Mme Vigier, femme d’un procureur de la capitale.

Elle le conduit pour le soigner jusqu’à son hôtel de la rue du Foin. Alors que Dieudonné fait plus ample connaissance avec la dame, son mari est retrouvé assassiné dans son bureau.
Contrairement aux apparences, l’inconnu surpris à ses côtés et qui s’enfuit en prenant Dieudonné en otage n’est pas le meurtrier. Cela, Dieudonné le comprend rapidement, en véritable Sherlock Holmes du XVIIe siècle qu’il est. Il soupçonne même Mme Vigier d’avoir voulu lui faire endosser le crime. Le piège aurait fonctionné sans l’apparition inopinée de l’inconnu, qui se révèle être un émissaire du roi de Suède. Une croix de paille fichée dans son couvre-chef témoigne de sa foi protestante.

Les deux hommes décident de poursuivre l’enquête ensemble et se rendent auprès du grand Coësre, le chef des gueux, dans la cour des Miracles de la porte Saint-Denis.

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La tour de Nesles, devenue collège des Quatre nations puis Institut de France.

En effet, celui-ci a été alerté par le valet d’un "dévot" qu’un complot vise à faire accuser les Protestants de la prochaine destruction d’un fort du royaume. Les gueux ont identifié M. Vigier parmi les comploteurs. Réalisant qu’une nouvelle Saint-Barthélémy se prépare, celui-ci est prêt à dénoncer ses complices, mais seulement à un homme réellement capable de s’opposer à une telle machination. C’est pourquoi le grand Coësre a appelé en renfort l’émissaire du roi de Suède, auprès de qui il a combattu pendant la Fronde.

A l’occasion d’une interpellation de nuit par une patrouille du guet, Dieudonné échoue malheureusement en prison. M. de La Reynie, le nouveau lieutenant de police qui vient d’être nommé par le roi [1], découvre par hasard l’identité de Dieudonné grâce au médaillon qu’il porte au cou (sans qu’il soit pour l’instant donné au lecteur d’en savoir davantage).
Impressionné par ses capacités intellectuelles, il le place sous sa protection et l’embauche comme commissaire secret.

Sa première mission est donc de démanteler le complot des dévots, et en particulier de mettre la main sur un mystérieux homme aux bottes rouges qui en est un des meneurs.

Avec l’aide de la police et des gueux, il parviendra à ses fins. La conjuration visait en réalité l’élimination des élites intellectuelles du royaume. La Marquise de Brinvilliers, soeur du lieutenant civil du Châtelet et redoutable empoisonneuse, en était aussi [2].

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Le marché Saint-Germain.

La rue Saint-Sauveur.Quelques lieux du roman :
- Dieudonné doit retrouver Charonne, un chef des gueux grâce à un intermédiaire sur le Pont neuf,
- l’homme aux bottes rouges est poursuivi par Dieudonné et les gueux dans la foire Saint-Germain (à l’emplacement aujourd’hui du marché Saint-Germain) et sur le chantier du collège des Quatre nations, aujourd’hui Institut de France,
- la marquise de Brinvilliers habite en son hôtel d’Aubray, 12 rue Charles V,
- l’hôtel Séguier (voir www.minefi.gouv.fr) se trouve entre la rue Bouloi et la rue du Louvre,
- on voit sur la carte ci-jointe l’emplacement de la cour des miracles de la porte Saint-Denis, presque au carrefour de la rue Thévenot (rue Réaumur) et de la rue des Petits-Carreaux (dans le prolongement de la rue Montorgueil) :

A lire :
- Les Croix de paille, Philippe Bouin, J’ai lu n°6177,
- http://fr.wikipedia.org.

A voir aussi : www.polarhistorique.com, le blog sur le roman policier historique.

[1] Le roman nous fait assister chez le chancelier Séguier à une réunion du conseil de réformation de la police mis en place par Louis XIV. Cette rencontre voit début 1667 Colbert imposer à Lamoignon (président du Parlement) et aux autres conseillers d’Etat la création de la lieutenance de police du prévôt de Paris. Il s’agit de coordonner l’action du lieutenant civil et du lieutenant criminel attachés au prévôt de Paris, du prévôt des marchands, du prévôt de l’île et du guet. C’est une révolution, car jusqu’alors les charges de police se transmettaient de père en fils. Les commissaires du Châtelet, jusqu’alors davantage préoccupés par des activités plus rémunératrices que par le maintien de l’ordre - peu ou pas rémunéré - vont être confiés au lieutenant de police, qui va dorénavant les faire rémunérer. On voit ainsi se dessiner la répartition des rôles : la justice au lieutenant civil et le maintien de l’ordre au lieutenant de police. Le prévôt de l’île et le guet passent sous l’autorité de ce dernier.

[2] Elle sera condamnée et exécutée en 1676 pour ses nombreux empoisonnements.



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