Artaud me dit :
Je suis allé hier à Saint-Germain-en-Laye. J’ai éprouvé une sensation atroce. Est-ce que vous
connaissez Saint-Germain-en-Laye ?
J’y suis allé deux ou trois fois.
C’est cet endroit que François 1er et sa suite avaient choisi pour leur orgie d’ordre spécial. J’en ressens encore le contrecoup après tant de siècles écoulés. Il y a comme un fluide
mauvais qui se dégage du château. Je n’ai rien de commun avec ce pourceau de François 1er,
et c’est parce que je n’ai rien de commun avec lui que j’en ressens une impression terrible.
Cette « impression » d’Antonin Artaud date du 2 septembre 1946, rapportée par Jacques Prevel dans son précieux ouvrage. Mais dès 1921, engagé dans la troupe de Charles Dullin, il y rencontre Génica Athanasiou [1], jeune comédienne d’origine roumaine. Une lettre du 31 août 1923 est adressée à : Mademoiselle Génica Atanasiou, pension Lamy-Mary, 132 rue de Poissy, Saint- Germain-en-Laye près Paris (…) Un autre lettre du 4 septembre de Marseille, dit notamment ; « Profite de ton séjour à St germain » (…)
(…) Artaud se rend chez les Thomas : 1 PLACE DU CHATEAU, belle et symbolique adresse inaugurale pour des écrivains et des artistes. (…)
(…) L’autre adresse saint-germanoise sera, en 1925, Pavillon Louis XIV, 2 rue d’Alsace. La correspondance d’Artaud à Génica est réexpédiée par la poste de la rue Nouvelle à Paris à cette adresse. Juin 1925, télégrammes de Modane et Paris. Et septembre, du 10 au 28.
Ces deux adresses sont proches de la forêt. Au 132 rue de Poissy, aujourd’hui Maréchal Foch, il y a une clinique. (…)
Extrait de « ARTAUD, BATAILLE, CELINE, auteurs célèbres à Saint-Germain-en-Laye » de Bernard Goarvot. Editions Hybride 2003.
Christian Besse-Saige
[1] Colette née Gibert qui épousera Henri Thomas en 1942. Note de l’éditeur.